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GENÈVE – La régie peut-elle facturer au locataire son absence à l’état des lieux de sortie?

Question de Monsieur Roger B. à Genève : « J’ai lu dans un journal récemment, la réponse d’un avocat à une question posée par un lecteur qui lui demandait s’il était possible que sa régie lui facture Fr. 150.– car il ne s’était pas présenté à l’état des lieux de sortie. Selon cet avocat, cela semblerait possible. Je trouve cela injustifié. »

Nous avons également lu cette chronique dans un journal régional et partageons l’avis de notre lecteur : rien ne justifie qu’un propriétaire facture Fr. 150.– au locataire qui ne se présente pas à l’état des lieux de sortie, et ce pour plusieurs raisons.

D’une part, le coût correspondant à l’activité déployée par la régie en faveur du bailleur est déjà compris dans le loyer payé par le locataire : en effet, celui-ci sert à rémunérer le bailleur pour la cession de l’usage de l’appartement et est censé couvrir tous les frais encourus par celui-ci, tout en lui permettant d’obtenir un rendement équitable des fonds propres qu’il a investis.

Parmi les frais encourus par le propriétaire, figurent les charges financières (intérêts hypothèques) ainsi que les charges courantes et les charges d’entretien.

Parmi les charges courantes, figurent précisément les honoraires de gérance versés par le bailleur aux régies pour leur travail.

Ces honoraires font donc partie du loyer et n’ont pas à être supportés séparément par le locataire.

Ainsi se déplacer pour un état des lieux de sortie fait partie du travail ordinaire des régies et ne constitue pas des frais supplémentaires.

Certaines régies prétendent que si le locataire est absent à l’état des lieux de sortie qui avait été fixé, elle doit absolument en faire un autre voire mandater un huissier judiciaire pour que celui-ci fasse un constat.

Rien de cela n’est nécessaire ou prévu par la loi : celle-ci prévoit uniquement qu’à la fin du bail, lors de la restitution de la chose louée, « le bailleur doit vérifier l’état de la chose et aviser immédiatement le locataire des défauts dont celui-ci répond » (article 267a al. 1 du code des obligations).

C’est donc l’avis des défauts qui est important mais non pas la présence du locataire à l’état des lieux de sortie.

Celui-ci peut être fait unilatéralement par le bailleur du moment qu’il fait parvenir dans les jours suivants l’avis des défauts prévu par la loi au locataire.

En effet, celle-ci prévoit que si le bailleur néglige d’aviser le locataire des défauts dont il répond, celui-ci est déchargé de toute responsabilité. Selon la jurisprudence, cet avis des défauts doit être donné dans les 2-3 jours ouvrables suivant la restitution des clés.

Il n’est dès lors pas nécessaire que le locataire soit présent à l’état des lieux de sortie pour qu’un bailleur puisse faire valoir ses droits en cas de dégâts.

À cet égard, il convient également de rappeler qu’il appartient au bailleur de prouver que la chose est affectée d’un défaut excédant l’usure normale et que le défaut n’existait pas à l’entrée du locataire ; le locataire ne doit jamais verser une indemnité correspondant à la remise à neuf des installations qu’il a endommagées puisque le bailleur doit en tous les cas tenir compte de leur degré de vétusté et de leur durée de vie (à cet égard, on se rapportera à la tabelle d’amortissement commune aux associations de bailleurs et de locataires publiée sur le cite de l’ASLOCA (asloca.ch/informations-pratiques).

Si le bailleur souhaite avoir un témoin de l’état de l’appartement lors de la restitution des clés, il peut, en l’absence du locataire, faire appel au concierge ou à n’importe quelle autre personne ; le recours à un huissier judiciaire n’est pas nécessaire puisque son constat (payant) n’a pas plus de valeur probante que n’importe quel autre témoignage (gratuit).

François ZUTTER, avocat répondant, ASLOCA GENEVE

Article paru dans la Tribune de Genève du 17 octobre 2015

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