Actualités

GENEVE – Le loyer de sous-location est abusif: que faire?

Question de Roger B. de Genève : « J’ai pris un logement de 3 pièces en sous-location, pour 1300.- frs mensuels + charges. Le logement était meublé de vieilleries provenant d’une grande chaîne de meubles. J’ai appris par la suite que le loyer payé par le locataire était de 800.- frs+ charges. Quand j’ai réclamé mon dû, le locataire a refusé de discuter, arguant que j’avais signé le bail, que le logement était meublé et que de toute façon le gain éventuel devait être remis au bailleur ! Que faire ? »

La sous-location à des conditions non-abusives est un droit. Sous l’angle du prix, elle ne doit pas servir au locataire (sous-bailleur) à faire du profit. Elle vise en effet à soulager son budget du paiement de tout ou partie du loyer, en cas d’absence pour un certain temps, respectivement de remise de partie d’un logement, devenu trop grand par exemple. Tirer profit de celle-ci comporte des risques : le sous-bailleur s’expose, selon les circonstances, au feu croisé du propriétaire, du sous-locataire, de l’administration (s’il y a changement de l’affectation d’habitation du bien en affectation commerciale, notamment en sous-louant de façon permanente via une plateforme internet) et du ministère public (si le loyer pratiqué est usurier)!

En pratique, les formalités pour fixer le loyer conformément à la loi n’ont pas été accomplies par celui qui sous-loue. Partant, le sous-loyer est réputé nul et le trop perçu (à savoir la différence entre le loyer pratiqué et celui licite) doit être remboursé au sous-locataire rétroactivement, même s’il avait accepté le montant du loyer en signant un contrat. Par ailleurs, le propriétaire peut aussi prétendre à cette manne en arguant que c’est le gain d’une gestion illicite de son bien, qui lui revient. A nos yeux, en cas de concurrence des prétentions du propriétaire et du sous-locataire, il va de soi que le trop versé doit revenir à l’appauvri, donc au sous-locataire. Il n’y a pas de raison que le propriétaire s’approprie la marge abusive encaissée au détriment du sous-locataire.

Le sous-loyer devrait être identique au loyer, sauf prestations supplémentaires (paiement des SIG, meubles, etc.). Pour les meubles mis à disposition, une certaine jurisprudence a admis un pourcentage forfaitaire de hausse du loyer hors charges de 10-20%. Cela est inapproprié, car revient à faire dépendre la rémunération de la location des meubles, du montant du loyer, au lieu que logiquement elle soit fonction de la qualité des meubles. Ainsi, dans notre cas, des meubles de faible qualité de surcroît amortis viendraient à rapporter 80.- à 160.- frs par mois (800 x 10-20%) et donc seraient remboursés valeur à neuf en un an ! Il serait plus logique de considérer la valeur des meubles (un meuble de qualité avec une durée de vie de 15 ans, acheté 1500.- frs et loué neuf, justifie, amortissement et rendement pris en compte, une hausse du loyer de 120.-frs par an donc 10.- frs par mois). Des meubles amortis ne valant rien, ils ne devraient pas justifier de hausse du loyer de sous-location, ou à la rigueur un montant symbolique tenant compte d’une valeur d’usage.

Notre lecteur doit saisir l’autorité de conciliation pour faire fixer le sous-loyer et se voir rembourser son dû.

Pierre STASTNY

Article publié dans la Tribune de Genève du 22 octobre 2016

Posted in