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GENEVE – Un sous-locataire peut-il être expulsé sans jugement ?

Question d’Isabelle d’Onex : Je vis dans un appartement sans avoir de contrat. Je paie tous les mois le loyer à la vraie locataire. Or, elle s’est présentée à ma porte il y a quelques jours, se montrant très agressive, et me demandant de partir d’ici au 30 avril 2021. Elle m’a dit qu’elle fera appel à la police si je ne suis pas partie à cette date. En a-t-elle le droit ?

Un contrat de bail existe quand bien-même il n’a pas été couché sur une feuille de papier. En effet, la loi n’exige pas la forme écrite et un bail peut être conclu par un simple échange de prestations, soit la jouissance d’un appartement contre le paiement d’un loyer.

Comme il est difficile de prouver l’existence du contrat en pareil cas, il est d’autant plus essentiel de conserver les preuves de paiement du loyer ou, à tout le moins, de s’en acquitter en présence d’un témoin.

Ecrit ou pas, locataires et sous-locataires bénéficient de la protection du droit du bail, y compris contre les résiliations.

En outre, si un bailleur ou un sous-bailleur procède à une évacuation de force, sans disposer d’un jugement l’y autorisant, il commet diverses infractions (violation de domicile, contrainte, voire menace) sanctionnées par une peine pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement.

Ainsi, seul un Tribunal peut autoriser une expulsion de force d’un logement, en rendant un jugement visant la personne concernée, après examen de sa situation concrète et moyennant l’octroi d’un sursis humanitaire, cas échéant. A Genève, la loi prévoit que ces audiences se font en présence des représentants de l’Office du logement et de l’Hospice général, dont le rôle est notamment de s’assurer du respect du principe de proportionnalité.

On précisera enfin que sur décision du Conseil d’État, les évacuations forcées des locataires et sous-locataires sont suspendues jusqu’au 15 mai 2021, crise sanitaire oblige.

En d’autres termes, jusqu’à cette date en tout cas, même si un huissier devait se présenter à la porte de notre lectrice en se prévalant d’un jugement la visant et autorisant la sous-bailleresse à recourir à la force publique pour obtenir son expulsion, la police refusera d’intervenir et l’exécution de l’évacuation sera donc reportée.

Orlane VARESANO, ASLOCA Genève

Article publié dans la Tribune de Genève du 21 avril 2021

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