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GENEVE – Projet de loi contre la LDTR : Un requin s’en prend aux locataires

Une fois de plus le député-propriétaire Ronald Zacharias a déposé un projet de loi pour tenter d’empêcher les recours des associations de locataires.

Ronald Zacharias, député-propriétaire genevois, a déposé un projet de loi visant à supprimer la qualité pour recourir de l’ASLOCA. Sous couvert de promouvoir l’accès à la propriété, ce projet vise en réalité à s’engouffrer dans une carence de l’administration pour faciliter les ambitions spéculatives des grands propriétaires.

Pour rappel, la LDTR protège le parc locatif contre la spéculation, notamment en fixant des règles en matière de hausses après travaux et de congés-ventes, à savoir les résiliations en vue de forcer le locataire en place à acheter son logement.

Le Tribunal fédéral a jugé, à plusieurs reprises, l’importance de préserver le parc immobilier locatif existant, surtout en période de pénurie. Cet intérêt est d’autant plus fort que depuis une décennie la moitié des logements construits sont destinés à la vente. Dès lors, si le parc immobilier locatif était laissé à la libre disposition des propriétaires, il fondrait comme neige au soleil. Par ailleurs, les logements vendus seraient rendus plus chers sans que les locataires n’en tirent un avantage. Les limitations posées dans la LDTR sont donc indispensables.

Malheureusement les autorités chargées de l’application de la LDTR ont souvent fait preuve de carence dans l’examen des dossiers qui leur étaient soumis par les propriétaires. De nombreuses ventes d’appartements ont été autorisées alors qu’elles n’auraient pas dû l’être.

Une mauvaise volonté politique

Ces carences relèvent d’une volonté politique de ne pas appliquer la LDTR. Peu à peu le service qui s’occupe des autorisations de vente a été affaibli pour ne compter bientôt qu’un collaborateur. Encore faut-il noter que ce dernier n’est pas juriste alors que la mise en oeuvre de cette loi présente une complexité certaine.

Cette tendance ne date pas d’aujourd’hui. Aussi, la loi confère un droit de recours aux associations, notamment à l’ASLOCA. Cela garantit une certaine effectivité aux dispositions de la LDTR. Cette qualité pour recourir est un garde-fou qui pallie les trop fréquentes lacunes de l’administration.

Droit de recours de l’ASLOCA

Supprimer le droit de recours de l’ASLOCA et des associations risquerait de faire de la LDTR un tigre de papier. Or les propriétaires, assistés d’avocats spécialisés, ont souvent fait preuve d’une forme de génie juridique pour tenter de faire prendre des vessies pour des lanternes en matière de vente à la découpe des immeubles. Face à cela, le «deuxième regard» de l’ASLOCA est un élément déterminant pour veiller à la poursuite des intérêts visés par la LDTR. Pour faire passer leur énième projet de loi contre la LDTR, les milieux immobiliers invoquent de nouveau l’accès à la propriété comme principal instrument pour soulager les locataires des loyers abusifs qu’ils leur imposent.

Il faut donc une fois encore rappeler que les principaux obstacles à l’achat d’un logement ne sont ni l’ASLOCA ni la LDTR, mais les prix prohibitifs qui découlent de la spéculation pratiquée sans vergogne par les auteurs du projet de loi. Il faut aussi rappeler que la population a surtout besoin de logements locatifs bon marché, ce que vise la LDTR.

Damien Chervaz
Avocat
ASLOCA Genève

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